Chères toutes et tous,
Depuis quelques semaines maintenant, nous avons démarré l’examen d’une réforme d’ampleur qui va affecter la vie de millions de Français : le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans.
2 années de plus, 24 mois à travailler pour la même pension ou presque, plus de 700 jours qui pourraient être des moments de loisirs, de partage, de temps passé avec les amis, la famille ou à s’engager pour les autres. Autant de jours perdus pour ces femmes et ces hommes, et je pense particulièrement aux métiers difficiles : les auxiliaires de vie, les ouvriers, les agents d’entretien, celles et ceux qui font tenir le pays debout, dont les corps sont abîmés par des postures, par les vibrations, le bruit, les charges lourdes, la répétition des tâches… et que la durée de travail supplémentaire va abîmer encore plus.
Cette réforme est un impôt sur la vie.
Vous avez été nombreux à suivre attentivement les débats à l’Assemblée nationale. Ils ont été vifs, cela est vrai. Parfois excessifs, et je le regrette. Néanmoins, je souhaite apporter quelques correctifs à certaines caricatures qui en ont parfois été faites. Si nous n’avons pas pu aller jusqu’au bout des débats, c’est parce que le gouvernement a fait le choix d’une procédure « cadenassée », l’article 47-1 de la Constitution qui lui permet de réduire à 20 jours le délai d’examen alors que le projet concerne des millions de Françaises et de Français, aujourd’hui et demain. Le Rassemblement national était aux abonnés absents, quand il ne proposait tout simplement pas des amendements xénophobes (retrouvez un extrait de mon interview à ce sujet sur BFMTV en cliquant ici). J’aurais aimé cependant des débats plus dignes car je pense que l’on peut s’opposer fermement tout en se respectant.
Mon groupe, celui des députés socialistes a été fer de lance d’une opposition résolue et responsable, force de proposition, mobilisée et déterminée à dire non à la retraite à 64 ans. Aux côtés de nos partenaires de gauche, nous partagions une même détermination : protéger notre système de retraite.
Tout d’abord, nous avions déposé des amendements pour démontrer l’impact d’une telle réforme sur les vies des françaises et des français : des amendements destinés à empêcher ces « vies brisées », pour refuser le recul de l’âge de départ aux enseignants, pompiers, AESH, infirmières etc…
Sur la stratégie, nous avons toujours été sans ambiguïté, nous avons entendu les organisations syndicales, nous souhaitions débattre de l’article 7. C’est pourquoi nous avons retiré nos amendements restant avant cet article après avoir discuté des régimes spéciaux, de l’index d’emploi des séniors, et après avoir tenté de proposer des modalités alternatives de financement d’un déficit ponctuel du système (voir ci-après).
Enfin, nous avons usé de toute notre culture parlementaire pour démontrer que cette réforme est non seulement injuste, mais aussi que le Gouvernement a adopté une stratégie de communication trompeuse : mon collègue Jérôme Guedj a ainsi pu user de son pouvoir de contrôle en tant que président de la mission d’évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale afin de prouver ce que nous clamions haut et fort depuis le mois de janvier (retrouvez un article de presse sur ce sujet en cliquant ici) : le minimum de pension à 1200€ usé comme un argument d’autorité par le ministre du Travail n’était qu’une forfaiture qui ne concernera en réalité qu’une poignée de gens (retrouvez mon explication sur ce sujet technique en cliquant ici).
En tant que coordinateur du groupe socialiste sur cette réforme et avec mes collègues, nous avons siégé pendant trois semaines, dans l’hémicycle et en commission des affaires sociales, tous les jours de 9h à 00h pour porter une autre réforme des retraites : une réforme juste où l’âge de départ n’est pas de 64 ans et où le financement de notre système par répartition est plus équilibré, en taxant par exemple les superprofits des compagnies pétrolières qui engendrent des bénéfices records ou les retraites chapeau.
La communication des ministres consistant à faire croire que cette réforme allait améliorer la condition des femmes, des carrières longues et des petites pensions n’a pas résisté à l’épreuve de la réalité.
Cette réforme créerait de la précarité : avec la réforme de l’assurance chômage qui réduit les délais d’indemnisation, elle poussera les personnes au bord de la retraite dans la pauvreté. En clair, les femmes, les carrières hachées, longues, les petites pensions seront pénalisées puisqu’elles travailleront 2 années de plus pour rien. Les contreparties brandies par la Première ministre pour satisfaire l’alliance avec le groupe LR se sont cassées les dents sur notre travail méthodique de vérification des faits. Certes, la loi intègre quelques maigres compensation – à l’instar d’un article sur les TUC à la suite du rapport et de la loi que j’ai déposée en décembre dernier (retrouvez un article de presse sur ce sujet en cliquant ici) – mais que dire quand on fait travailler 2 ans de plus les mêmes anciens emplois TUC ou SIVP des années 1980 en échange de quelques trimestres légitimement réintégrés ? La pilule reste tout aussi amère.
Vous trouverez ci-après un condensé de mes interventions à l’Assemblée nationale qui, j’espère, ont permis d’éclairer un débat parfois tronqué par des approximations d’un Gouvernement à bout de souffle pour justifier d’une réforme inutile économiquement, politiquement et socialement.
Le texte est désormais entre les mains du Sénat, mais également entre vos mains, celles de la France à l’arrêt du 7 mars prochain. Ensemble, faisons reculer le Gouvernement, obtenons le retrait de sa réforme !